Longtemps réservés aux laboratoires et aux salons de l’électronique, les robots humanoïdes s’ouvrent enfin au grand public. La jeune pousse chinoise Noetix Robotics vient d’annoncer « Bumi », un robot de 94 cm vendu l’équivalent de 1 200 € un tarif près de dix fois inférieur à celui des modèles concurrents de Figure ou Unitree. Ce lancement, déjà salué par la précommande de plusieurs centaines d’unités en deux jours, pourrait marquer une étape décisive : celle où la robotique sort des laboratoires pour entrer, modestement, dans les foyers et les salles de classe.
Un compagnon plus qu’un assistant domestique
Bumi ressemble à un adolescent d’aluminium : torse compact, deux jambes bicolores, un visage-écran affichant des expressions stylisées. Pas de mains articulées ni de moteurs de forte puissance : la start-up mise sur un usage ludique et pédagogique plutôt que sur l’assistance ménagère. Le robot dialogue via un modèle de langage embarqué, exécute des pas de danse, raconte des histoires et peut se synchroniser à un tableau interactif pour animer un cours de sciences. Noetix cible ainsi les écoles qui cherchaient jusqu’ici des solutions de robotique éducative plus accessibles que Pepper ou Nao.
Comment atteindre un prix aussi bas ?
Le secret réside dans une conception « minimum viable » :
- Matériaux : châssis plastique moulé, seulement deux moteurs haut de gamme (pour les hanches) et des servos plus simples pour le reste.
- Électronique : un unique SoC ARM qui gère à la fois la vision par caméra 720 p et l’IA conversationnelle allégée.
- Fabrication locale : production dans la province du Guangdong, au cœur de l’écosystème des composants, réduit les coûts logistiques.
Noetix promet un rythme de 1 000 unités par mois dès 2026, tout en laissant la porte ouverte à des versions plus avancées si la demande suit.
Quelles limites aujourd’hui ?
À 1 200 €, il ne faut pas s’attendre à un majordome autonome :
- Pas de préhension : sans mains, Bumi ne peut ni servir un café ni ranger un livre.
- Autonomie réduite : deux heures d’usage mixte avant de revenir à sa base de recharge.
- Mobilité prudente : vitesse de marche limitée à 1 km/h, adaptée à un environnement scolaire plus qu’à la livraison de colis.
Ces contraintes n’empêchent pas l’appareil de remplir son rôle de compagnon interactif : aide aux devoirs, exercices de langues, chorégraphies en groupe. Pour les enseignants, le logiciel inclut déjà des modules STEM (sciences et programmation) qui exploitent les capteurs de mouvement pour illustrer des notions de physique.
Un marché en pleine effervescence
Depuis début 2025, le segment « humanoïde abordable » s’agite :
| Société | Modèle | Prix annoncé | Usage ciblé |
|---|---|---|---|
| Unitree | R1 | 5 500 € | Assistance légère |
| Figure | 03 | 20 000 € | Logistique d’entrepôt |
| Noetix | Bumi | 1 200 € | Éducation, famille |
La baisse des coûts suit celle des drones et des imprimantes 3D : à mesure que les capteurs LiDAR et les servomoteurs chutent en prix, de nouveaux acteurs s’engouffrent pour proposer des robots spécialisés.
Vers une seconde révolution pédagogique ?
Les tablettes avaient déjà transformé la classe ; un petit humanoïde pourrait aller plus loin en matérialisant concepts et interactions. Reste à résoudre les enjeux :
- Durabilité : qu’en est-il des pièces détachées ?
- Cybersécurité : comment protéger un robot connecté en permanence ?
- Acceptation sociale : quelle place accorder à une machine dans l’éducation des enfants ?
Noetix affirme chiffrer les échanges cloud et propose un kit de maintenance simple (moteurs et coques amovibles). Un programme pilote débutera en mars 2026 dans dix écoles de Shanghai et de Shenzhen ; une extension vers l’Europe dépendra des retours d’expérience et de la conformité au marquage CE.

Conclusion
Avec Bumi, la robotique humanoïde franchit un seuil symbolique : pour la première fois, un robot « à deux jambes » tombe sous la barre des 1 500 €. Même limité, ce compagnon ouvre une ère de démocratisation comparable à celle des premiers PC familiaux. Reste à voir si l’usage suivra : si les écoles et les familles adoptent vraiment l’idée de parler chaque soir à un petit robot de 94 cm, la science-fiction des années 1980 deviendra, un peu plus, notre quotidien.
